Un tour au Palais Royal...

Phnom Penh et ses secrets

Portant en son sein d’incroyables bâtiments coloniaux, de quartiers aménagés, restaurants, bars, attractions, musées, parcs, monuments et autres architectures impressionnantes que sont les bâtiments religieux, on peut aujourd’hui désigner Phnom Penh comme une véritable petite «perle de l’Asie ». Sa célébrité est notamment accrue par la présence de la demeure des rois khmers qui se sont succédés sur le trône. N’importe qui serait impressionné de voir la magnificence de cet édifice.

Le palais royal arbore fièrement ses toits khmers dont les extrémités, surmontées de dorures, s’élancent vers le soleil telles de fragiles pétales de fleur jaunis. Comment ne pas tomber sous le charme d’une ville si magique ? Un tel spectacle vaut largement qu’on lui voue le coût et le temps de visite nécessaire afin de pouvoir y déceler tous les mystères. Constituant la ville la plus peuplée du Cambodge, en raison de son titre mais également de son attractivité, la population atteint  un nombre approchant les un million cinq cent mille pour une superficie de 290 km².

Fondée au milieu du XVe siècle, la ville atteint son apogée bien après. Tour à tour occupée puis conquise par des rois ambitieux, elle devint capitale du Royaume sous l’Indochine française. La ville prend donc un tout autre essor, sans cesser d’évoluer, elle acquiert de plus en plus d’importance sous la main des français qui y laissèrent un incroyable héritage colonial témoignant de son histoire. Cependant,  la ville puissante de son image touristique constitue également la racine de mauvais souvenirs qui arrachent encore le cœur des khmers. En effet, l’ancienne prison de Tuol Sleng est une des traces d’un passé douloureux, un passé polluant encore l’air de la cité, bien trop récent pour pouvoir en parler sans trébucher sur les mots.

Ce matin, après un rapide petit-déjeuner au bord de la piscine à l’hôtel Villa Lanka, nous rejoignons Deth qui nous attend avec notre jeune chauffeur de tuk-tuk. Tous deux sont chargés de nous faire découvrir la ville. Nous avons beaucoup de chance pour ce premier jour car le temps semble se prêter relativement bien à une visite complète de la ville. Alors que nous nous trouvons sur le territoire khmer en pleine saison des pluies, autrement dit la mauvaise période pour les voyages, nous bénéficions de la douce chaleur des rayons du soleil qui chauffe déjà aux premières heures de la journée ! C’est donc, avec bonne humeur que nous grimpons dans le tuk-tuk…

Assis sur les étroites banquettes assez confortables de notre tuk-tuk, l’air sur nos visages et le sourire aux lèvres, nous déambulons dans la ville à travers un dédale de ruelles. C’est de cette manière-ci que nous découvrons la circulation anarchique du pays : ça roule dans tous les sens, ça double à droite, à gauche sans jamais se percuter qu’il s’agisse de voitures, scooters, camions, bus ou même de Tuk-Tuk . Deth nous apprend que la seule et unique règle de circulation au Cambodge est « qu’il n’y a aucune règle ! ». Nous ne tardons pas à mieux comprendre cette étrange affirmation en prenant plus de soin à observer et analyser le poids du trafic. Ici, les véhicules ne respectent pas les priorités et passent au feu rouge quand bon leur semble : Les panneaux ne servent, pour ainsi dire, strictement à rien. De toute façon il n’y en a que très peu. Les casques sont obligatoires pour les motos mais les conducteurs n’en portent que la journée pour les enlever aux premières heures de la nuit lorsque les policiers ne rodent plus dans les parages. 

Entrée au Palais...

Residence royale depuis le Quai Sisowat

Arrivés au niveau du marché central, nous faisons un court arrêt aux stands de change, histoire de faire un peu de monnaie en riels et de changer les billets de 100 dollars en petites coupures pour les pourboires…car au Cambodge nous pouvons payer en riels et en dollars !

 

Ainsi, nous atterrissons devant l’entrée du Palais Royal, cet impressionnant complexe de bâtiments avec ses dorures et ses toits khmers qui me font penser à de millier de pétales de fleurs tournés vers les rayons du soleil… Preah Barum Reachea Veang Chaktomuk est le nom complet de ce Palais Royal mais bien trop difficile à prononcer.  Résidence officielle de l’actuel roi Sihamoni, le vaste domaine est en partie fermé au public lorsque le roi s’y trouve . Nous n’avons alors accès à la pagode d’argent et ses alentours qu’aux heures de battements de celui-ci, et si la chance nous sourit la salle du trône nous sera ouverte quelques instants, car habituellement fermée aux yeux du public pour quelques raisons personnelles du Roi.

Le Cambodge possède une histoire très complexe puisque le pays connut plusieurs cités état successives. A partir du IXemeAngkor, la célèbre cité khmère demeura la capitale du Royaume Khmer pendant plusieurs siècles. Chaque souverain accédant au pouvoir orna la cité de son propre temple, pour obtenir finalement une accumulation extraordinaire d’infrastructures qui, ajoutées les unes aux autres, constituent aujourd’hui un incroyable complexe de plusieurs centaines d’hectares. 

Mais la cité connut un déclin progressif au point de s’éteindre complètement, dévastée par l’armée siam(Thaïlande) qui avait accumulé un pouvoir effrayant à la fin du XVe siècle. Plus tard, la capitale fut déplacée  d'abord à Phnom Penh, qui à l'époque se nommait Krong Chatomok Mongkol Serei ,puis déménagea en 1494 pour Basan, puis Longvek et enfin Oudong (Udong). La capitale ne revint à Phnom Penh qu'au XIXe siècle. Le palais actuel fut édifié sur les restes d'une vieille citadelle appelée Banteay Kev sous le règne du roi Norodom Ier après que celui-ci eut abandonné l’ancienne capitale située à Oudong. C’est aux alentours de 1860, lorsque le roi signa un accord de protectorat avec les français que la ville devint le siège permanant du gouvernement et que débuta la construction du Palais Royal.

Nous entrons, puis émerveillés de la beauté extérieure du lieu, nous traversons les battants d’une magnifique porte en fer de couleur vert amende dont les complexes motifs ont été façonnés par les khmers selon un apprentissage d’héritage français, puis nous nous pressons d’aller voir de plus près ce Palais. Derrière cette porte, la pagode d’Argent trône au cœur d’un magnifique jardin décoré de vasques remplies d’eau où flottent et tourbillonnent fleurs de lotus et nénuphars colorés. Deth nous arrête devant le mur d’enceinte de la pagode où est illustré, sur une superbe fresque réalisée en 1900, la légende de Râmâyana (Reamker au Cambodge) et certains passages de la bataille de Lanka.

 

Légende de Râmâyana

 

Le Râmâyana : c’est avant tout un épisode fondateur ancré dans l’histoire indienne qui rythme les mœurs et a vie des populations d’Asie du sud. Peintures, fresques, gravures, livres, cérémonies, offrandes, chantée en sanskrit sur des livres, dans les pagodes ou sur les bas-reliefs des célèbres temples d’Angkor, cette légende racontée de manière diverse et variée avec toujours la même effervescence prolifère partout au Cambodge, ce pourquoi il est impossible de revenir du pays khmer sans en avoir entendu parler…. Le Râmâyana est une légende épique hindoue écrite par un sage sous la dictée des dieux. Ancienne de deux millénaires le Râmâyana est une véritable épopée, très longue et détaillée qui raconte « le parcours de Rāma » d’où la légende tire le nom. Le récit débute par la naissance du prince Rāma, le septième avatar du dieu Vishnou, et poursuit l’aventure invraisemblable sur des centaines de pages qui décrivent l’ensemble des péripéties de sa vie et de ses conquêtes, notamment celle de Sîtā, sa belle épouse victime d’un enlèvement injuste. Celle-ci sera délivrée par son époux et injustement punie par son destin…

Le prince Rāma connait une éducation joyeuse, dans l’abondance et la richesse. Son statut d’avatar de Vishnou lui vaut les plus beaux privilèges. Mais c’est véritablement l’amour qui va venir frapper à ses portes. En effet, l’unique prince à avoir pu brandir l’arc du dieu Shiva, connait aussi ses premiers émois pour la jeune Sîtā, qu’il reçut en récompense de son exploit. Le temps presse. Lorsqu’il attend l’âge de maturité et qu’il réclame sa succession au trône, son père l’en écarte définitivement après l’avoir cédé à l’une de ses favorites par faiblesse. Le jeune prince, ayant soif de pouvoir tout comme son père, est forcé à l’exil dans les forêts centrales de l’inde d'Ayodhya en compagnie de sa bien-aimée Sîtā. 

Mais au cours de cet exode, le couple royal est attaqué par des brigands dont le chef,  le démon aux multiples têtes Rāvana et frère jaloux de Rāma, projetait de sombres ambitions. Cet exil lui offre l’opportunité inespérée d’enlever la divine Sîtā, pour laquelle il éprouvait de profonds sentiments puis d’en  faire son humble épouse. Seulement, Rāma, avait déjà pressenti le subterfuge de Rāvana et lors d’un banquet royal organisé dans son palais, auquel furent conviés de prestigieux invités, il avait pris soin de  protéger sa femme d’un cercle magique infranchissable. Néanmoins Rāvana parvint à capturer la belle en s’emparant de sa main et la destituant de son cercle magique. Du haut de son char ailé conduit par des monstres carnivores, il prit la fuite avec Sîtā qu’il emprisonna sur l’île de Lankâ aux portes de son royaume lointain nourri par son amour aveugle et la vaine tentative de séduction qu’il déploya pour elle. Les troupes de soldats du roi furieux se lancèrent immédiatement à la recherche de la reine enlevée. Après une longue et pénible recherche, Rāma conclut une alliance avec le roi des singes qui lui fournit le commandant en chef Hanuman, avatar de Krishna, patron de la sagesse, et également frère de Sîtā. A la tête d’une redoutable armée composée d’hommes et d’animaux, il franchit l’océan d’un bond prodigieux et atteint l’ile Ceylan où il découvrit la captive. Après de successives péripéties fantastiques, il rentre enfin informer Rāmā de ce dont il a été témoin. Grâce à ces précieuses informations, l’épopée épique s’engage sur une terrible guerre opposant les forces du mal à celles du bien au terme de laquelle le démon Rāvana fut tué par Rāma qui récupéra son épouse légitime.

 

Alors qu’une période de prospérité s’annonçait après la délivrance de la Reine enlevée, les commérages du bas peuple prient leurs aises dans la cité au point de parvenir aux portes du palais. Selon les rumeurs qui couraient Sîtā fut accusée d'avoir commis un adultère envers son premier époux lorsqu’elle fut retenue captive. Cette rumeur parvint malencontreusement aux oreilles du roi sceptique qui se sentit immédiatement poignardé en plein cœur et humilié de cette nouvelle. Ainsi, Rāma soumis sa propre femme à « l’épreuve du feu » afin de s’assurer de sa fidélité. Celle-ci consistait à passer à travers un rideau de feu et d’en sortir indemne. Dans le cas contraire, si le corps ne supportait pas les flammes, alors Sîtā se consumerait au rythme du brasier ce qui prouverait son infidélité. Le problème se posa ainsi : comme tout le monde le savait, la reine était inéluctablement damnée puisque ne possédant pas de sang divin contrairement à son mari, elle savait d’avance que son corps ne supporterait pas les flammes. Seul le roi bénéficiait d’un corps indestructible.

Sachant qu’elle périrait dans les flammes, Sîtā, enragée contre son propre mari qui doutait de son amour pour lui, prit en main son destin.Afin d’accomplir une vengeance personnelle, elle invoqua le dieu de la Terre et lui demanda de l’absorber le moment venu de l’épreuve afin de l’épargner d’horribles souffrances. Le dieu de la Terre accéda à sa requête et le jour de l’épreuve du feu, Sîtā disparue sous la terre. La légende dit que son corps se métamorphosa en lotus blanc, aujourd’hui symbole de pureté envers Bouddha… Bien sûr, elle était innocente.

Une autre version de la légende atteste de son innocence. Sîtā aurait réussi avec succès l’épreuve du feu, après quoi, Rāmā dont le triomphe était inégalé, ramena son épouse dans son royaume où il sera sacré et dont l’apothéose nourrit les manuscrits.

Jardins Royaux

Avant de pénétrer à l’intérieur de la célèbre pagode, Deth nous amène plus loin au fond du jardin d’où nous avons une vue imprenable sur la face de la pagode. Cela nous donne para ailleurs l’occasion d’observer de plus près les deux sanctuaires dédiés aux rois Norodom fils d’Ang Duong. Ces deux stupas gris ornés de motifs religieux  se situent symétriquement aux côtés de la statue équestre du roi Norodom qui orne les jardins royaux, statue offerte par l’empereur Napoléon III, en personne, en 1863.

Sanctuaire du Roi Norodom

Sanctuaire du Roi Ang Duong

La Pagode d'Argent

Le moment tant attendu ; nous nous déchaussons et pénétrons à l’intérieur de la pagode où malheureusement nous n’avons pas le droit aux photos. C’est une explosion de couleurs qui nous attend au cœur du lieu saint heureusement épargné par les khmers rouges durant leur régime sanguinaire. La pagode d’argent doit son nom à son sol constitué de vastes dalles d’argent pesant chacune 1.2 kg selon les informations précises de Deth !  Elle fut édifiée en 1892 sous le règne de Norodom. Sa structure était alors entièrement revêtue de bois dont un architecte français remplaça en 1962 dans l’espoir de la rendre moins vulnérable aux flammes. L’ancien toit en bois est actuellement exposé au musée national de Phnom Penh.

Son second nom, Preah Keo qui signifie  «  la pagode du Bouddha d’Emeraude » ne ment pas sur le trésor qu’elle abrite. Au sommet d’un autel coloré très « kitsch » trône un remarquable Bouddha d’Emeraude du XIXe qui serait en cristal de Baccarat. Parmi d’autres sculptures très impressionnantes figurent le Bouddha Maitreya incrusté de diamants et plusieurs statues de Bouddha en or et en pierres précieuses .La salle est remplie de vitrines remplies de statuettes de bouddha et autres cadeaux en bronze et en argent offerts au monarque. Nous contournons également le palanquin du roi transmis dans les générations successives et qui, nous l’apprend Deth, sert encore aujourd’hui lors de certains déplacements royaux !!

En sortant de la pagode nous enfilons nos chaussures et descendons les quelques marches qui surélèvent l’imposant bâtiment, nous passons devant le sanctuaire de la fille de Sihanouk, décédée à l’âge de 7ans puis nous arrêtons à l’arrière de la pagode devant la maquette miniature de l’immense complexe d’Angkor Vat. Puisque la résidence est actuellement occupée par le roi (Sihamoni), Deth nous propose de revenir visiter les quartiers privés cet après-midi lorsque le roi n’y sera plus. En attendant nous prenons la direction de la sortie.

Mais avant de dépasser le portail qui indique la fin de la visite, quelques pièces touristiques sont également à visiter si bien que nous prenons le temps de nous y arrêter. Dans une salle dédiée aux éléphants, la « White elephant place », plusieurs selles royales sont exposées sur des piédestaux en bois, certaines modernes mais d’autres très anciennes. Nous nous arrêtons notamment devant l’une d’entre-elles qui daterait de l’époque du roi français Louis-Philippe ! Dans cette salle, outre les selles qui y sont exposées, un éléphant blanc occupe la majeure partie de la petite pièce. Ces éléphants bénéficient d’une place non négligeable dans l’héritage culturel du pays. Il parait, selon certaines croyances khmères, que lorsque le royaume a besoin d’un nouveau roi, si un éléphant blanc se prosterne devant un des candidats au trône, alors celui-ci et immédiatement nommé roi sans plus attendre. Il ne reste plus qu’à attendre que la statue se prosterne devant nous  et l’affaire sera réglée…

 

Plus loin un couloir qui mène à la sortie est dédié à l’exposition de plusieurs photographies du roi et ses prédécesseurs en présences de grandes personnalités dirigeantes telles que Gandhi, Mao, ou encore Charles de Gaulles !

Commentaires (1)

Johny Jackson
  • 1. Johny Jackson (site web) | 21/01/2018
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