La majestueuse cité d'Angkor Thom

Carte d'entrée pour Angkor

 

En arrivant sur le site après s’être fait pris en photo pour pouvoir entrer (une photo d’identité de chaque visiteur est nécessaire à l’administration), nous sommes stupéfaits de voir le monde présent durant cette base saison, mais le plus étonnant reste l’effectif majoritaire des populations asiatiques : des japonais, des chinois ou des coréens, rebaptisés  « les moutons » par notre guide. Je le trouve déjà assez incroyable dans la mesure où il s’agit d’un vétéran du régime des khmers rouges, mais en plus il a l’humour ! : Je pense que nous allons bien s’entendre …

Le tuk-tuk nous dépose devant la porte sud d’Angkor Thom. Cette cité royale édifiée à la fin du XIIe siècle et au début du XIIIe siècle, après la conquête d'Angkor par les Chams. Son fondateur est sans doute le plus connu de tous les rois de l’histoire du Cambodge, Jayavarman VII (qui régna entre 1181 à 1219 ), c’est-à-dire le roi des dieux-rois qui introduisit le bouddhisme… Si la « cité dans la cité »( désignant Angkor Thom), fut connue pour avoir été bâtie par Jayavarman VII ainsi qu’élevée au titre de « dernière grande construction d’Angkor » jusqu’au déclin du XVIe siècle, ses plus impressionnantes structures furent construites bien des années auparavant. Le Baphuon fut œuvré par Udayâdityavarman IIe entre 1050 et 1060 , dates de son règne tandis que le Palais Royal et le Phimeanakas  furent édifiés encore bien plus tôt par Survayaman Ier qui détînt le pouvoir entre 1002 et 1050.

 

Porte sud

Pour atteindre la Porte Sud nous franchissons le rempart entourant la cité, lui-même ceinturé d’une douve de 100 m. La porte s’ouvre sur une allée bordée de visages taillés dans le grès qui pèsent sur la chaussée. Ces visages sont d’immenses géants de pierre de 2 m de hauteur représentant les personnages mythiques d’une scène du Barattage de la mer de lait, dominé par un incroyable naga, le serpent mythique ornant la majorité des entrées des temples d’Angkor.

 

Barattage de la mer de lait

Mythe issu de la religion hindouiste, le "Barratage de la mer de lait" conte l’histoire primitive de la victoire du bien sur le mal. Selon la légende, les redoutables démons surnommés les « Asuras » luttaient dans une guerre acharnée pour la maîtrise du monde contre les « Devas », autrement dit : les dieux bienfaisants. Tous étaient mortels donc vulnérables, mais les Asuras se révélèrent bien plus puissants et affaiblirent rapidement les Devas jusqu’à les vaincre définitivement. Alors les Devas se tournèrent vers Vishnou auquel ils demandèrent d’unir leurs forces pour lutter contre les démons. Mais la proposition de Vishnou fut plutôt inattendue: unir leur puissance à celle des Asuras afin d’extraire le nectar d’immortalité de Kshirodadhî, la mer de lait. Pour atteindre leur but, ils devaient parsemer la mer d’herbes magiques, retourner le mont Mandara pour le poser sur la carapace de la tortue Kûrma, un avatar de Vishnou puis demander l’aide du roi des Nâgâs de sorte à faire pivoter la montagne sur place. Mais dès lors que les Devas furent en possession de la substance immortelle, les Asuras s’en emparèrent. Vishnou se déguisa en la femme la plus belle du monde afin de dérober la coupe aux Asuras, qui subjugués par la beauté, ne se doutèrent pas du complot.  Les Devas devinrent immortels et envoyèrent les Asuras aux enfers …

 

Les 54 démons et leurs coiffes en queue de poisson 

 

Notre guide nous fait remarquer les visages des géants situés à droite et à gauche de cette chaussée : ceux du côté droit ont l’air effrayants, les sourcils froncés, le sourire narquois et les yeux démoniaques, arborant une coiffe à trois pointes «  en queue de poisson ». Ils se prénomment « les Asuras ». Ceux du côté gauche ont, à l'inverse, des visages apaisés, le front ceint d’une coiffe conique , ce sont « les Devas »

 

Les "Asuras"

Les "Devas"

 

En avançant sur le pont traversant la représentation symbolique de l’océan entourant le mont Meru, nous approchons l’imposante porte en pierre de latérite. Dans chacun des quatre angles de la porte monumentale, un éléphant tricéphale de 6 m de haut garde l’entrée. Sur leurs têtes, se trouve Indra, « dieu des dieux ». Dans sa main droite, il tient l'arme qui lance la foudre, il est entouré de ses deux femmes déesses.

 

Le Bayon

Notre périple se poursuit 1.5 km plus loin. Grandiose est un adjectif adéquat qui permet de qualifier l’immense temple Bayon. Ce temple « montagne », nommé ainsi par sa forme surélevée et imposante,  est célèbre pour ces impressionnants colosses aux visages souriants taillés dans un labyrinthe de tours majestueuses. A particularité de ces colosses est qu’ils possèdent un don de voyance, ce pourquoi ils nous suivent du regard durant toute la visite. Un, deux, trois, quatre, …je suis perdue dans ce dédale de sourires désarçonnants ….

 

Encore une fois, Jayavarman VII n’est pas pour rien le plus grand roi connu du royaume khmer ayant façonné Angkor Thom. De son règne qui dura entre 1181 et 1219, il nous a laissé le fascinant temple du Bayon, avec ses multiples tours surmontées de quatre visages sereins. Ce temple est autant énigmatique que complexe. Il a traversé les différentes religions qui se sont battues au cours de l’histoire pour laisser la victoire au bouddhisme. Sa construction eut pour but tout à la fois de servir de résidence royale que de bâtiment religieux mais sa signification reste encore bien mystérieuse. Ses pics ornés de visages colossaux d’Avalokiteshavara sont certainement ceux qui éveillent le plus la curiosité à leur approche. Selon les historiens, le Cambodge était durant l’apogée d’Angkor, divisé en 54 provinces ce qui expliquerait le fait que 54 tours ornaient autrefois le temple montagne, cependant aujourd’hui nous comptons et recomptons mais rien à faire : 17 manquent à l’appel…

 

Douces Apsaras

Cependant si ces visages énigmatiques demeurent la principale attraction touristique, la seconde chose à laquelle nous faisons attentions est la représentation de ces célèbres apsaras, nymphes célestes d'une grande beauté, danseuses privées du roi. Ce sont les compagnes des Devas (dieux binfaisants) autant que des Asuras (démons mortels) que nous avons pu observer à l’entrée de la cité. Elles symbolisent la féminité et la grâce autant que l’harmonie et l’esprit divin. Certains disent qu’elles connaissent 64 manières d'éveiller les sens. Représentées comme de belles jeunes femmes à moitié nues, dont on peut voir les seins et les formes gracieuses, elles nous plongent dans un monde atemporel…

 

Apsaras - Bayon 

 

Les Bas-reliefs

 

Je ne saurais décrire le plaisir de savourer les différentes scènes de combats et de la vie quotidienne représentées sur les bas-reliefs du temple d'une richesse exceptionnelle, je crois même que ces gravures sont d’égale beauté que les incontournables fresques Grecques …Le message qu’elles parviennent à nous faire délivrer est d’autant plus passionnant.

Après l’âge d’or d’Angkor, caractérisé par la monstrueuse édification d’Angkor Vat, à la fin du règne Survayarman II qui s’étala entre 1112 et 1152,  le royaume connu un déclin progressif. Les finances royales ne suffirent plus au roi qui s’était lancé dans une construction bien trop faramineuse. De plus, Angkor vat, fut à l’origine d’une déforestation massive dans les régions peuplées l’est et au nord d’Angkor et d’une surexploitation du système d’irrigation qui écrasa le peuple de dettes insurmontables.  Le déclin de la cité fut alors inéluctable. Survayarman II conduisit une délégation militaire désastreuse contre les Dat-Viet (Vietnamiens.)puis mourut atrocement au cours de la bataille. Plus tard, la situation politique se troubla notamment avec plusieurs conflits entre la population Khmère et les habitants de l’ancien royaume de Champa, appelés les Chams. En 1177, ceux-ci endommagèrent la cité d’Angkor qui croula sous le poids de ses propres temples. Ils dérobèrent et brulèrent les constructions en bois dont l’édification s’était étalée sur plusieurs vies de règne. Tout fut mis à terre. Mais après quatre ans de combats acharnés, Jayavrman VII, conquit le pouvoir et parvint à repousser la menace Cham. Les bas-reliefs du Bayon illustrent cet affrontement :

 

La fuite des Chams

 

La Battaille Navale 

 

Jugement final de Yama et retour au quotidien après la victoire khmère

 

Le Baphuon

En rejoignant le Baphuon à pied, nous passons devant une grande statue de Bouddha destinée à recevoir des dons, mais nous ne nous y attardons pas longtemps pressés de nous rendre au second temple montagne.

Représentation pyramidale du mythique mon Meru, le Baphuon fut certainement l’un des plus beaux temples d’Angkor à son apogée. Ce temple spectaculaire, fut érigé au milieu du XIe siècle par Udayâdityavarman II dont les dernières modifications s’achevèrent au XIIIe siècle.

Nous arrivons au pied du temple par l’un de ses cotés quand une armée entière de touristes se presse sur le pont principal, surélevé sur de petites colonnes cylindriques. Celui-ci prend fin au pied de l’enceinte dont l’impressionnante tour s’élève dans les cieux. Néanmoins, du temple nous ne voyons plus qu’un tas de ruines mais le gopura restauré tardivement ne cesse de m’écraser de sa grandeur. Nous pénétrons alors au cœur du gopura qui reste le dernier morceau du temple encore debout. Les gravures représentent de nombreuse scènes de la légende de Râmâyana durant laquelle le roi Rama délivra son épouse enlevée et abandonnée sur l’ile de Lanka par le démonique Ravana, frère de Rama, ainsi que la triade des divinités hindoue, Vishnou, Shiva et Brahma.

Plusieurs gradins successifs surmontés en marches colossales nous guident au sommet du temple doté d’une impressionnante tour pyramidale symbolisant le mythique Mont Meru, le centre du monde. Son grand bouddha couché taillé dans le mur me subjugue totalement ! Les historiens ont pu constater qu’une partie des constructions s’écroulèrent prématurément mais que les pierres furent ensuite réutilisées pour former cette statue encastrée dans le mur : chef d’œuvre de l’art Khmer ! Mais je ne suis pas encore au bout de mes surprises…

 

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