Phnom Penh pour la second fois

« La campagne cambodgienne »

 

Comme il est encore tôt et que nous nous trouvons à une dizaine de minutes de Phnom Penh, Deth décide de nous amener au cœur de la campagne cambodgienne bien que nous demeurons sceptiques puisque nous ne pensions pas trouver « l’authenticité campagnarde» aussi près de la ville, et ce même si la ville cache son aspect rural et sa pauvreté par quelques commerces insignifiants… Après un passage au Ratanakiri puis au Mondolkiri, il serait difficile de voir une région encore plus campagnarde et isolée des nuisances citadines.  Mais nous ne tardons pas à comprendre son double jeu, il nous amène « à la campagne » car il n’avait pas anticipé notre avance sur le programme due aux changements occasionnés en cours de voyage et son problème est que nous avons déjà visité Phnom Penh. En temps normal  nous aurions dû arriver dans la capitale en fin de soirée et le problème aurait été réglé ! ... sauf que nous ne nous trouvons qu’à quelques kilomètres qui nous séparent de Phnom Penh et la journée ne fait que commencer : et « le programme c’est nous ! »

 

Nous retraversons le village de Skuon que nous croyions avoir quitté ce matin, puis bifurquons sur une petite route terreuse qui marque l’entrée dans « la campagne » .Il serait difficile de la rater car l’entrée est également marquée par un bâtiment construit spécialement pour que les touristes la remarque ! Nous descendons du van et faisons quelques mètres à pieds parmi les cabanes à pilotis qui bordent le chemin sableux. Plusieurs campagnards, grillent des brochettes de viandes et de poissons à l’approche du déjeuner. Une jeune femme assise nous offre des chaises près de sa maison et nous propose un jus de fruit frais.

Nous reprenons la voiture pour nous enfoncer plus loin dans la forêt et parvenons dans un petit village d’agriculteurs après avoir traversé plusieurs sentiers serpentant entre la végétation dense et feuillue. Nous contournons un dernier troupeau de vaches conduit par un jeune garçon d’une dizaine d’années.  Deth nous fait descendre de la voiture à la rencontre d’une famille de khmers qui lui sont proches. Tandis qu’il se met à plaisanter avec eux, ils nous accueillent fort chaleureusement sous le pas de leur porte. Nous restons quelques secondes à nous jauger et je finis par comprendre : couleur de peau, sourire éclatant, visage éclairé, fraicheur naturelle, yeux pétillants en amande, cheveux couleur de jais, petite taille pour les femmes et muscles saillants pour les hommes, mentalité épicurienne; voilà la recette détaillée de la population khmère.

 

 

Nous contournons la cabane du couple et parvenons jusqu’aux champs de rizières qui s’étalent dans la cambrousse sur plusieurs mètres à l’horizon. A l’habitude, nous aurions dû être témoins du travail harassant fourni par les habitants aux champs, durant la semence ou la récolte du riz mais en raison du manque d’eau dans la région, les pousses s’assèchent dangereusement, et menacent de faner sans même que la récolte n’ait eu lieu. Ayant atteint le seuil maximal de pauvreté, ces gens ne pourraient plus se permettre de vivre correctement sans le riz, source première de nourriture. Or si les habitants du village de campagne ne parvenaient pas à se procurer de l’eau en vitesse, la perte d’une saison entière de riz aurait pour conséquence : absence de nourriture et donc, malnutrition de toute la population, maladies, déshydratation… Avec la pluie que nous avons eue, nous avons quand même du mal à  croire que le pays manque d’eau. De surcroit, il bénéficie d’un avantage sur ses voisins frontaliers : la présence du plus vaste lac d’eau douce du sud de l’Asie, qui se prénomme le Tonlé Sap.

 

Phnom Penh pour la second fois

Avant de faire route vers la capitale, Vanna et Deth , impatients de déjeuner, nous déposent dans un petit restaurant local au cœur de la campagne. Nous sommes les seuls clients avec deux autres Khmers bien portants, qui s’empiffrent de riz et de nourritures asiatiques. Ils se partagent trois ou quatre assiettes de poissons, d’homards et viandes grillées. Même à nous trois nous n’arriverions pas à terminer leurs portions démesurées. Ces deux hommes, s’ils sont nés au Cambodge, font exception à la majorité pauvre des individus du territoire. Nous dégustons, quant à nous, chacun une assiette de poisson grillé présenté avec une sauce sucrée à l’ananas que je n’aime pas particulièrement mais dont je me contenterai. De toute manière avec tout ce que nous avons mangé depuis le début du voyage,  nos estomacs commencent réellement à crier de trop- plein.

Nous arrivons aux abords de la capitale en début d’après-midi, puis libérons nos accompagnateurs lorsque nous arrivons au Villa Lanka qui nous est très familier étant donné que nous y avons dormi au début du voyage. En y repensant, nous venons de le quitter il y a, à peine, une quinzaine de jours que nous n’avons pas eu le temps de voir défiler ! Nous dressons un bilan très positif de la première partie du voyage, en essayant de repousser l’idée qu’il ne nous reste plus que quelques jours à passer dans le royaume khmer, lointain confrère français ! Nous déposons nos bagages au troisièmes étage, chambre 43, exactement la même où nous avons dormi la première fois. D’ailleurs nous reprenons chacun les mêmes lits sans nous consulter. Puis nous sortons nous promener en ville.

 

Les quatre bras du Mékong - Phnom Penh 

 

En sortant de l’hôtel, nous retrouvons le beau monument de l’Indépendance qui embellit le centre-ville au coin de la rue, puis poussons la promenade en passant par un grand  « Luna Park » pour enfants. En voulant rejoindre le quai Sisowat  nous arrivons au bout d’un cul de sac. Nous prenons le chemin inverse, passons dans un quartier monopolisé par des hôtels de luxe, croisons deux ou trois pagodes, des enfants à vélo qui nous interpellent tout en évitant les piétons nombreux dans la ville et arrivons sur « la promenade des anglais » (parce qu’elle ressemble à la promenade niçoise), officiellement appelé « Quai Sisowat ».  Nous l’arpentons pour la seconde fois du voyage avec autant de plaisir tout en discutant de tout et n’importe quoi, de nos impressions du voyages, de ce que nous avons préféré ou moins apprécié … Nous nous arrêtons acheter un sachet de cacahuètes et une bouteille d’eau fraiche à une vielle dame portant un lourd plateau sur son épaule droite.

Nous croisons également beaucoup de touristes agglutinés aux bars et restaurants trop chers pour n’importe quel cambodgien. Pendant que les touristes sirotent leur verre de rosé, leur cuisine occidentale et ignorent tout du pays,  certains locaux font leur sport sur des machines de musculation dans un espace en plein air aménagé en face des Quatre bras du Mékong, sur la large avenue touristique. Certains touristes en profitent aussi mais la plupart préfèrent s’assoir sur des bancs aménagés le long du quai, bordé d’un trottoir de verdure sur lequel des dizaines de palmiers fleuries ont été alignés. Nous passons devant le Palais Royal où la foule se fait encore plus dense puis arrivons au bout de la promenade et décidons de faire demi-tour au restaurant Titanic où nous comptons diner dans la soirée. Nous pensons que nous  nous y rendrons en tuk-tuk car, en estimant que nous sommes partis de l’hôtel en début d’après-midi, nous venons de marcher plusieurs heures sans nous être arrêtés. Nous faisons chemin inverse en ayant soin de passer exactement aux endroits que nous avons empruntés à l’allé pour ne pas risquer de nous perdre jusqu’à ce que nous rentrions au Villa Lanka en fin d’après-midi. Nous constatons alors que nous venons de marcher (en tongs) un peu moins de trois heures pour une dizaine de kilomètres. Toutefois,  en comparant aux randonnées de 13 à 20 km que nous avons l’habitude faire en France, ce n’est rien !

Le soir nous payons donc un tuk-tuk pour qu’il nous conduise au Titanic. Il est obligé de faire plusieurs détours car beaucoup de routes ont été barricadées et demeurent sous surveillance de la police nationale afin d’éviter les attroupements en cette soirée d’élections. Mais en arrivant au restaurant, un serveur nous indique que le Titanic est fermé pour la soirée et ne recevra pas de clients, sans doute en raison de ces élections qui semblent être un évènement majeur dans l’histoire du pays. A la place nous indiquons précipitamment un autre restaurant au chauffeur de tuk tuk. En arrivant nous avons du mal à trouver une table avec la foule qui s’y agglutine ; la soirée s’annonce agitée et bonne. Nous n’avons pas vraiment le choix du repas dans la mesure où la carte a été limitée à cinq ou six plats, encore en raison des élections. Papa prend des spaghettis bolognaise tandis qu’Amandine et moi penchons pour la cuisine asiatique avec une assiette de nouilles aux crevettes et au poulet. Nous mangeons avec envie et prenons un temps pour digérer. Pour finir, une douce nuit de sommeil nous pousse à nous enfuir au Villa Lanka.

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